Annexe A : Principales théories de CCSC en PF

Lors de la conception d’un programme de CCSC, une théorie ou une association de théories peut être utilisée pour guider les messages et les approches.

Par exemple, l’utilisation de la théorie de la diffusion de l’innovation (TDI) dans un programme de PF rural où la majorité des femmes âgées de 35 ans ou plus ne sont pas allées à l’école et ont peu accès aux médias de masse démontre le rôle puissant que les agents de changement peuvent jouer dans le changement des comportements de ces communautés.

Si les agents de changement sont des « déviants positifs » qui ont adopté l’espacement des naissances avec succès, ils peuvent être d’excellents messagers de la sécurité des méthodes de PF et démontrer comment une famille de taille inférieure leur permet de gagner de l’argent et de subvenir aux besoins de leur famille. À mesure que ces messages se propagent dans et entre les communautés, de plus en plus de femmes peuvent adopter les méthodes de PF modernes.

La figure ci-dessous présente les théories de changement de comportement les plus fréquemment utilisées dans les programmes de CCSC et elle identifie le niveau d’intervention en fonction de l’approche socio-écologique décrite à la section 3 : Utilisation de la CCSC pour aborder les grossesses AMA et HP. De plus, cette annexe fournit des explications détaillées de chaque théorie ainsi que des exemples d’application de chaque théorie dans les programmes de CCSC .

 

Ressources

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Vous ne savez pas quelle théorie utiliser ?

Essayez d’utiliser TheoryPicker, un outil interactif qui vous aide à identifier ce qui pourrait constituer la meilleure théorie de changement de comportement pour un programme donné. L’outil vous fait passer par un certain nombre d’étapes et vous amène à répondre à un certain nombre de questions pour aider à déterminer la meilleure théorie ou le meilleur groupe de théories à utiliser pour la conception de votre programme.

Théories de la CCSC

Modèle basé sur la croyance en la santé

 

Que nous dit le modèle basé sur les croyances sur la santé pour ce qui est du comportement ?

Le modèle basé sur les croyances sur la santé met en avant la nécessité des programmes de prendre en compte les croyances individuelles autour du problème traité, ainsi que les coûts et les obstacles associés au changement de comportement. Ce modèle repose sur l’hypothèse qu’une personne est susceptible de changer de comportement si elle ressent l’une des impressions suivantes :

Vulnérabilité/gravité perçue : la personne croit qu’elle court un risque. Par exemple, une femme croit qu’il y a des risques pour sa santé associés à une grossesse AMA ou HP.

Avantages perçus : la personne croit que le changement de comportement sera de nature à réduire le risque. Par exemple, une femme croit que l’utilisation de la contraception lui évitera d’avoir une grossesse AMA ou HP.

Obstacles perçus : la personne interprète le coût/les obstacles du comportement souhaité. Par exemple, une femme croit que son partenaire ne voudrait pas qu’elle utilise une contraception, mais, pour elle, les bénéfices de l’utilisation d’une contraception pour prévenir une grossesse à haut risque l’emportent sur la réaction de son partenaire.

Motivations à agir : les stratégies pour activer la « disposition » d’une personne à agir. Par exemple, une femme reçoit une éducation à la contraception et aux différentes options à sa disposition.

Auto-efficacité : confiance en sa capacité à agir. Par exemple, une femme est confiante sur sa possibilité d’accéder à la contraception et à l’utiliser correctement pour éviter une grossesse non désirée.

Comment le modèle basé sur les croyances sur la santé peut-il être mis en application ?

Le modèle basé sur les croyances sur la santé est mieux utilisé lors de la promotion de comportements préventifs individuels, comme l’utilisation du préservatif ou la vaccination. Il se concentre sur les croyances et les perceptions de la personne. Il est donc approprié de modifier les comportements qui ne sont pas fortement influencés par la société et les normes sociales. Il nous apprend l’importance de mettre en évidence les conséquences négatives du comportement actuel tout comme les conséquences positives du comportement alternatif suggéré.

Par exemple, les femmes de certaines villes d’Afrique subsaharienne retardent la date à laquelle elles fondent une famille afin de terminer leurs études et de débuter une carrière. Toutefois, les femmes ne sont pas toutes conscientes des risques liés à une grossesse plus tard dans leur vie. Les responsables de programmes peuvent utiliser le modèle basé sur les croyances sur la santé afin de prévoir des programmes ciblés pour les jeunes femmes qui souhaitent remettre une grossesse à plus tard en les informant des dangers des grossesses AMA et les aidant à prévoir de fonder une famille à un âge et une période qui leur conviennent, et d’espacer les grossesses afin d’assurer qu’elles ont bien le nombre d’enfants qu’elles souhaitent.

Théorie du comportement planifié

Que nous dit la théorie du comportement planifié sur le comportement ?

Selon la théorie du comportement planifié (découlant du concept initial de théorie de l’action raisonnée), le comportement est influencé par trois éléments :

Attitude : le sentiment que le comportement sera bénéfique à la personne. Par exemple, une femme pense que l’utilisation d’une méthode de PF moderne est une bonne manière de mettre en pratique l’espacement des naissances.

Normes subjectives : la croyance que les autres pensent que le comportement est acceptable. Par exemple, une femme croit que son partenaire, ses amis et sa famille seraient favorables à ce qu’elle utilise une méthode de PF moderne.

Capacité perçue : la croyance que l’on possède les compétences et la capacité pour changer de comportement. Par exemple, une femme croit qu’elle est en mesure d’avoir accès à et d’utiliser une méthode de PF moderne avec succès pour la PEIGS.

Comment la théorie du comportement planifié peut-elle être mise en application ?

La théorie du comportement planifié peut être utilisée pour changer les comportements fortement influencés par les pairs et le réseau social proche. Cette théorie indique que le réseau social proche doit être ciblé pour soutenir le changement de comportement souhaité chez la personne. Elle nous dit aussi qu’il est important de mettre en évidence les avantages à court terme du changement de comportement pour promouvoir l’action.

À Lomé, au Togo, par exemple, il y a plusieurs services de PF de qualité et de nombreuses femmes connaissent et utilisent des méthodes de PF modernes et comprennent les opportunités que leur offre l’utilisation d’une telle méthode. Toutefois, des rumeurs courent sur les dangers des méthodes modernes, telles que l’infertilité, et les femmes n’utilisant pas de méthode se demandent si elles doivent faire confiance à ces méthodes « scientifiques » et artificielles. La théorie du comportement planifié permet aux programmateurs de planifier des interventions qui touchent les femmes n’utilisant pas de méthode au moyen d’informations précises sur les méthodes de PF. Ces messages sont transmis par les experts et les modèles les plus crédibles afin de dissiper les rumeurs et d’établir la confiance dans les méthodes de PF modernes.

Étapes du changement

Que nous disent les étapes du changement sur le comportement ?

Les étapes de la théorie du changement (parfois appelées « modèle transthéorique ») indiquent que les personnes franchissent différentes étapes lors d’un changement de comportement. Cette théorie suppose que les personnes possèdent différents degrés de motivation et de disposition au changement, qui déterminent l’étape de changement à laquelle ils se trouvent actuellement. Selon cette théorie, les différentes étapes du changement impliquent des besoins d’information et des approches différents pour essayer de faire passer la cible à l’étape suivante. Même si les personnes peuvent progresser de façon prévisible dans ces étapes, une personne peut régresser ou sauter des étapes. Les étapes sont les suivantes :

Précontemplation : il n’y a aucune intention de changer de comportement ultérieurement. Par exemple, une femme ne pense pas à utiliser une contraception pour éviter une grossesse AMA ou HP.

Contemplation : la personne est consciente du problème et envisage sérieusement de le surmonter, mais elle n’est pas encore engagée à prendre des mesures. Par exemple, une femme a entendu parler des méthodes de PF modernes et pense à commencer à en utiliser une.

Préparation : une personne a l’intention d’agir immédiatement. Par exemple, une femme prévoit de se rendre à l’établissement de santé ce mois-ci pour commencer à prendre une méthode de PF moderne.

Action : une personne commence à adopter le comportement en question. Par exemple, une femme commence à utiliser une méthode de PF moderne pour espacer ses grossesses.

Entretien : une personne ne change pas de comportement et s’efforce de le maintenir. Par exemple, une femme continue à utiliser une méthode de PF moderne de son choix de façon régulière et correcte.

Certains professionnels de la CCSC ont ajouté une sixième étape à ce modèle : le plaidoyer. Le plaidoyer est l’étape au cours de laquelle une femme continue à utiliser une méthode de PF moderne et vante les mérites de la méthode de PF moderne à ses amis, qu’elle encourage à essayer.

Comment les étapes de changement peuvent-elles être mises en application ?

Les étapes de changement peuvent être utilisées dans des situations de tête-à-tête, par exemple, entre un client et un conseiller. Savoir à quelle étape de changement se trouve le client aidera le conseiller à sélectionner les informations à partager. Lors des étapes de précontemplation et de contemplation, les informations se focaliseraient sur les faits, les risques du comportement actuel et les avantages du changement de comportement. Lors des phases de préparation et d’action, elles se concentreraient davantage sur les opportunités de changement de comportement et la façon d’y parvenir.

Dans certains pays, la grossesse elle-même est considérée comme une situation à haut risque en général, et l’AMA et la HP ne sont pas considérés comme des facteurs contribuant particulièrement au risque. Les étapes de la théorie de changement peuvent aider les gestionnaires de programme à prévoir des interventions pour aider les hommes et les femmes à mieux comprendre les dangers des grossesses AMA et HP et les aider à se préparer à l’action pour éviter la survenue de ces grossesses à haut risque dans leur foyer et leur famille.

Théorie de l’apprentissage social

Que nous dit la théorie de l’apprentissage social sur le comportement ?

La théorie de l’apprentissage social reconnaît l’interaction entre une personne et son environnement. L’environnement extérieur est l’endroit où une personne peut observer une action, en comprendre les conséquences et trouver la motivation de la reproduire et de l’adopter. Le comportement est influencé par des facteurs structurels, comme la disponibilité du service et les politiques, ainsi que par des facteurs sociaux, comme les normes sociales et l’influence des pairs.

Dans la mise en oeuvre de la théorie de l’apprentissage social, l’apprenant (cible) est encouragé à :

Observer et à imiter le comportement des autres. Par exemple, une femme peut observer son amie utiliser des méthodes de PF modernes et par conséquent décider qu’elle souhaite également utiliser une méthode de PF moderne.

Découvrir les comportements positifs modélisés et mis en pratique. Par exemple, une femme constate que son amie est contente de la méthode de PF moderne qu’elle a choisie. Cela lui donne envie d’en faire autant et d’adopter le même comportement.

Augmenter sa propre capacité et sa confiance à mettre en oeuvre de nouvelles compétences. Par exemple, lorsque la communauté d’une femme soutient davantage et parle de l’accès aux méthodes de PF modernes pour les femmes d’AMA et à HP, elle prend suffisamment confiance pour discuter avec son partenaire de l’utilisation d’une méthode de PF moderne.

Adopter des attitudes positives concernant la mise en oeuvre de ces compétences. Par exemple, après avoir appris comment utiliser une méthode de PF moderne, une femme se sent confiante sur sa capacité à l’utiliser dans le temps et est en bonne voie pour espacer ses grossesses.

Se rendre compte du soutien de son environnement quant à l’utilisation de ces compétences. Par exemple, une femme voit des familles heureuses dans son feuilleton télévisé préféré qui ont moins de cinq enfants et cela l’encourage à penser qu’elle pourrait être heureuse avec trois ou quatre enfants.

Comment la théorie de l’apprentissage social peut-elle être appliquée ?

La théorie de l’apprentissage social peut être utilisée pour des comportements fortement influencés par l’environnement physique et social dans lequel vit la personne. La théorie indique l’importance de créer un environnement favorable, facilitant le changement de comportement souhaité. Elle nous enseigne également que l’observation du comportement mis en pratique peut aider d’autres personnes à l’adopter. Cela peut être fait grâce à une incarnation, où le comportement souhaité, ainsi que les avantages qui en résultent, peuvent être démontrés et popularisés par des personnes modèles.

La limitation des naissances à moins de cinq par famille peut sembler impensable dans certains pays, par exemple. Toutefois, si le gouvernement a projeté les coûts d’une population élevée sur l’infrastructure, l’éducation, la santé, l’agriculture et la sécurité, il peut être convaincu que la réduction de la taille des familles est dans l’intérêt de la nation tout comme celui des foyers. L’incarnation de tailles de famille réduites peut être faite via la télé-réalité et d’autres médias de masse, ou par le témoignage de dirigeants politiques et communautaires, ainsi que par les femmes qui ont choisi d’avoir une famille de taille inférieure.

Diffusion de l’innovation

Que nous dit la diffusion de l’innovation sur le comportement ?

La diffusion de l’innovation fait référence à la propagation de nouvelles idées et de nouveaux comportements au sein d’une communauté ou d’une communauté à une autre. Certaines personnes et certains groupes au sein de la société sont plus rapides que les autres à s’emparer des nouvelles idées ou des « innovations ». Cette théorie identifie cinq catégories, qui définissent la propension d’une personne à accepter ou à adopter l’innovation :

  1. Innovateurs : les plus prompts à adopter une innovation. Cependant, les autres membres de la communauté peuvent les trouver inconstants et être moins susceptibles de leur faire confiance et de les imiter.
  2. Adopteurs précoces : plus grand public au sein de la communauté, ils se caractérisent par l’acceptation de l’innovation et les ressources personnelles/financières qui leur permettent d’adopter l’innovation.
  3. Majorité précoce : disposée à changer et persuadée des avantages de l’innovation par l’observation.
  4. Majorité tardive : sceptique et réticente à adopter de nouvelles idées jusqu’à ce que les avantages soient clairement établis.
  5. Retardataires : ceux-ci sont les plus conservateurs et résistants au changement ; dans certains cas, ils peuvent ne jamais changer.

La probabilité d’adoption d’une innovation/d’un comportement dépend de la cible, des obstacles environnementaux et des facilitateurs, du système de communication et des attributs de l’innovation, comme :

Avantage relatif : le comportement offre-t-il un avantage par rapport au comportement actuel ? Par exemple, l’utilisation d’une méthode de PF moderne offre-t-elle à une femme un avantage (par ex. une meilleure santé) dont elle ne bénéficie pas actuellement ?

Compatibilité : le comportement est-il compatible avec les valeurs sociales et culturelles existantes ? Par exemple, est-il culturellement acceptable pour une femme qui a cinq enfants d’utiliser une méthode de PF moderne ?

Complexité : dans quelle mesure le nouveau comportement est-il difficile à adopter ? Par exemple, une femme serait-elle en mesure de gérer l’utilisation d’une méthode de PF moderne (c.-à-d., prendre la pilule chaque jour, recevoir une injection selon un calendrier) ?

Capacité à essayer : le comportement peut-il être essayé sans trop de risques ? Par exemple, est-il possible pour une femme d’essayer une méthode de PF moderne et de voir comment ça se passe ?

Caractère observable : est-il possible de voir ce qui arrive à ceux qui adoptent le comportement ? Par exemple, une femme a-t-elle des amies qui utilisent des méthodes de PF modernes et qui peuvent lui en parler ?

Comment la diffusion de l’innovation peut-elle être appliquée ?

La diffusion de l’innovation peut être utilisée pour changer les comportements influencés par les normes et les tendances sociales. La théorie indique comment promouvoir le comportement souhaité en se focalisant sur les attributs. Cela peut être fait par le biais d’agents du changement, à savoir les adopteurs précoces d’un nouveau comportement qui en font la promotion auprès des autres et les incitent à adopter ce comportement. Les agents du changement peuvent être des personnes travaillant dans la communauté ou des membres de la communauté ayant adopté le nouveau comportement et pouvant servir de modèles. Le ciblage d’agents du changement efficaces, comme les leaders locaux, les personnalités influentes, les pairs et les célébrités, peut permettre d’accélérer l’adoption d’un nouveau comportement.

Par exemple, dans des pays où les femmes âgées de 35 ans ou plus en milieu rural n’ont pas été à l’école et ont peu accès aux médias de masse, les agents du changement peuvent être très puissants pour apporter les nouvelles technologies ou de nouveaux comportements dans les communautés rurales. Si les agents du changement sont des « déviants positifs » qui ont adopté la PF avec succès, ils peuvent être d’excellents messagers de la sécurité de l’utilisation de la PF, en démontrant comment une famille de taille inférieure leur permet de gagner de l’argent et de subvenir aux besoins de leurs familles. À mesure que ces messages se propagent dans et entre les communautés, de plus en plus de femmes peuvent adopter la PF moderne.

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